auteur

CASSE EMMANUEL (1864 - 1922)

Collecte en Périgord (Dordogne pour l'essentiel), autour de 1890 (ou dès avant ?) - 1918.
Abbé, vicaire à Brantôme (Dordogne) puis curé à Manaurie (Dordogne) de 1893 à 1922. Dans sa collaboration avec l'abbé Chaminade, sans doute assure-il les enquêtes de terrain, tout au moins celles – les plus importantes par la quantité – qui concernent les lieux avoisinant sa paroisse de Manaurie. Il est également compositeur de musique.
(Carrault, BNF, complété par nous).
Commentaires Coirault :
- Casse figure (avec Chaminade) dans la liste des collecteurs qui « se sont écriés tout d'une voix [après 1860] : La poésie populaire se meurt ; la poésie populaire est morte [...]. Il faut se hâter de recueillir ! » (Notre chanson folklorique, p. 24 et note 1.)
- A propos d'une variante textuelle : « si l'on admet la sincérité des collecteurs. » (Recherches sur notre ancienne chanson populaire, note p. 567.)


Publications susceptibles de concerner, concernant ou contenant des chansons, de la musique ou des danses traditionnelles.
Toutes les publications de Casse sont cosignées avec Chaminade , lequel publie un autre ouvrage sous son seul nom. Pour des raisons de commodité, nous mentionnons l'ensemble de leurs ouvrages de manière identique ici et sur la page Chaminade.


Avec Eugène Chaminade :
- Les vieilles chansons patoises du Périgord. Périgueux, Cassard jeune, 1902, in‑ 4°, 119 p. ; 2e éd., Périgueux, Cassard jeune, 1903. Les 2 éditions sont identiques, à l'ajout près dans la seconde de 8 pages numérotées « i » à « viij » publiant des réactions à la 1ère édition. Reprint Marseille, Laffitte, 1981 (sans doute de la 1ère édition, au vu de la pagination indiquée – avec une erreur – sur la notice de la BNF). Cette publication est anonyme, le nom des auteurs figurant sous forme de rébus. Contient 232 mélodies, dont 223 recueillies en Périgord.
La 2e édition est consultable sur le site de l'université de Bordeaux Montaigne.
Mentionné sans commentaire par Van Gennep.
Commentaire Coirault : « Abondant ; des arrangements lettrés » (Notre chanson folklorique, Bibliographie.)

- « Vieilles chansons patoises du Périgord, avec traduction adaptée au rythme musical », Revue de Philologie française et de littérature, t. XVII (1903), XVIII (1904), XIX (1905). Contient 94 mélodies, dont 93 inédites.
Consultable sur Gallica : 1903 , 1904 , 1905.
Mentionné sans commentaire par Van Gennep (qui le confond avec l'ouvrage précédent) et par Coirault.


- Chansons patoises du Périgord, avec adaptation en vers blancs au rythme musical, Recueil de chants populaires de la France, publiés par la Schola Cantorum, Paris, H. Champion, s.d. (1905). Contient 15 mélodies, toutes reprises de la Revue de Philologie française, à l'identique pour 11 d'entre elles, avec des différences pour les 4 autres.
Mentionné sans commentaire par Van Gennep (qui lui attribue le même numéro qu'à l'ouvrage précédent) et par Coirault.


Eugène Chaminade seul :
- « Trois chansons sarladaises », Le Mercure musical, t. I, Paris, 1905, p. 390-395. Contient 3 mélodies, toutes reprises, à l'identique, de la Revue de philologie française.
Consultable sur Gallica
Mentionné sans commentaire par Van Gennep, non mentionné par Coirault.


Emmanuel Casse, ou Eugène Chaminade, ou les deux :
- Annotations manuscrites portées sur un volume de la 1ère édition de Les vieilles chansons patoises du Périgord, circa 1918, bibliothèque de Périgueux (bibliothèque Pierre Fanlac, cote Z CAS MZ 2 513). Contient 202 mélodies, dont 33 semblent être inédites, 43 reprises de la Revue de philologie, 30 reprises sous forme d'harmonisation des Vieilles chansons patoises, et 89 de provenances diverses (voir plus bas aux Remarques une description plus détaillée de l'ouvrage).


Remarques
Contenu des ouvrages
Les Vieilles chansons patoises du Périgord contiennent :
- 219 mélodies apparemment directement collectées en Périgord par Casse et Chaminade,
- 3 compositions, dont 1 de Chaminade,
- 3 mélodies périgourdines publiées antérieurement par A. Dujarric-Descombes, Oscar Havard, et le comte de Saint Saud,
- 2 mélodies traditionnelles citées pour comparaison (Tiersot, diverses publications),
- 5 mélodies de musique ancienne ou religieuse citées pour comparaison.


Les Vieilles chansons patoises du Périgord, publiées dans la Revue de Philologie, contiennent des mélodies différentes des précédentes (l'indication fournie par Van Gennep comme quoi l'ouvrage précédent est « extrait de la Revue de Philologie » est fautive) :
- 92 mélodies recueillies en Périgord par Casse et Chaminade,
- 1 mélodie recueillie en Périgord par M. de Lombarès,
- 1 mélodie traditionnelle citée pour comparaison (Tiersot, Chansons populaires des Alpes françaises, 1903).


Le recueil de la Schola Cantorum et l'article du Mercure musical contiennent 18 mélodies recueillies par Casse et Chaminade en Périgord, toutes reprises de la Revue de Philologie (4 avec des différences, dans le recueil de la Schola).
La pagination du recueil de la Schola Cantorum est double : une, autonome, et l'autre prenant la suite du recueil précédent de cette collection. Nous indiquons le deuxième numéro entre parenthèses. La localisation des lieux de collecte est plus précise que dans la Revue de philologie.
La publication de l'article du Mercure est légèrement postérieure aux dernières de la Revue de Philologie (1er trimestre 1905).


L'exemplaire de Périgueux. Cet exemplaire de la 1ère édition des Vieilles chansons patoises du Périgord est déposé à la bibliothèque Pierre Fanlac de Périgueux (ex bibliothèque de Périgueux), sous la cote Z CAS MZ 2 513. Numérisé, il a été un temps disponible en ligne, mais ne l'est plus actuellement. Nous n'avons eu accès qu'à cette version numérisée, ce qui implique certaines approximations dans sa description (notamment en ce qui concerne la place des feuilles volantes).
Annoté de la main de Casse ou de Chaminade, ou des deux, il était visiblement destiné à préparer une 3ème édition de l'ouvrage (la page de couverture porte, au crayon, la mention 3ème édition à la même place que sur la couverture de la 2ème édition), réédition qui n'a pas eu lieu. Les pièces datées les plus tardives indiquent 1918.
Les adjonctions prennent trois formes : des pièces imprimées ou manuscrites, collées ou insérées à l'intérieur de l'ouvrage (nous indiquons entre quelles pages elles figurent sur le document numérisé, sans garantir qu'elles s'y trouvent matériellement) ; des annotations sur les pages du livre, et un cahier manuscrit paginé par feuillet (1 même numéro pour le recto et le verso) dont la numérotation prend la suite de celle du livre (p. 119 à 179). Une table des matières (incomplète, mais utile), organisée par provenances des chansons, figure à la fin du cahier.
L'ensemble des adjonctions comprend :
128 mélodies traditionnelles du Périgord :
- 34 mélodies déjà présentes dans Les Vieilles chansons patoises, dont 30 reprises pour harmonisation. 22 sont reprises à l'identique, et 12 présentent des corrections, ou des différences.
- 43 mélodies publiées dans la Revue de Philologie, dont 36 reprises à l'identique et 7 avec des différences.
- 28 mélodies qui semblent inédites, sans doute recueillies par Casse et Chaminade.
- 23 mélodies précédemment publiées : 4 par l'abbé Boyer (50 chansons patoises du Périgord), 1 dans le Patriote du Périgord, 12 par Trébucq (dont 9 de la collecte à Bordeaux auprès d'Emmanuel Garrau, originaire du Périgord) dans La chanson populaire et la vie rurale, des Pyrénées à la Vendée et 6 par Lambert dans Chants et chansons populaires du Languedoc, t. 2, 1906.
7 mélodies traditionnelles non localisées, peut-être périgourdines.
57 mélodies traditionnelles d'autres collecteurs provenant de diverses provinces :
- 14 autres mélodies publiées par Lambert, Chants et chansons populaires du Languedoc, t. 2, 1906.
- 18 mélodies publiées par Tiersot, dont 14 dans Chansons populaires des Alpes françaises, 1903, 1 dans Mélodies populaires des provinces de France, 1888, 1 dans la Revue des traditions populaires, 1889, et 2 sans indication de source.
- 1 mélodie publiée par Emmanuel Soleville dans Chants populaires du Bas-Quercy, 1889.
- 1 citation de Jean Poueigh sans autre indication que « Languedoc ».
- 3 mélodies provençales sans indication de source.
- 20 mélodies publiées par Weckerlin dans Chansons et rondes enfantines, 1885.
8 mélodies de musique ancienne : Clément Marot, Théodore de Bèze, Octante trois Pseaumes de David, mis en français (premières éditions : 1551, 1554). Peut-être que la mise en notation moderne est de Casse et Chaminade.
2 mélodies diverses (compositions, etc.)


Les conditions de la collecte
Casse et Chaminade précisent les apports (publiés ou inédits) des autres collecteurs. On peut donc raisonnablement considérer qu'ils sont les collecteurs de toutes les autres mélodies. Dans l'ensemble des ouvrages, on dénombre, en excluant les mélodies reprises d'un ouvrage à l'autre (avec ou sans modifications) 364 mélodies collectées en Périgord (sans compter les 7 mélodies non localisées qui ont pu l'être), dont 335 l'ont été, très vraisemblablement, par Casse et Chaminade.
Ils ne donnent pratiquement aucune information sur leurs informateurs. Et les très rares occurrences sont très imprécises : « Un boucher », « les anciens », « quelques gamins » sont les 3 informations que l'on trouve dans les Vieilles chansons (aucune ne figure dans les autres ouvrages). De même, aucune information n'est donnée sur la date de la collecte.
Seuls les lieux sont renseignés. Cela peut être de manière très précise et univoque. Ainsi, 245 mélodies sont localisées par la mention d'un seul lieu (en général une commune, parfois un lieu-dit) : ce qui signifie assez clairement que cette chanson, paroles et mélodie, a été recueillie en ce lieu. D'autres sont localisées de manière très générale par le nom de la province, ou par l'une de ses parties (Nontronnais, Sarladais, etc.) : ce qui, plutôt que « collectée dans », peut signifier « connue, répandue, ayant cours, dans ». Enfin, pour un bon nombre, plusieurs localités sont mentionnées, voire des localités et des mentions plus générales ensemble.
Il y a, mentions uniques ou plurielles confondues, 373 occurrences de nom de localités, réparties sur à peu près l'ensemble du département de la Dordogne : 39 des 50 anciens cantons sont représentés, mais de manière très inégale selon le nombre de mélodies. Ainsi, les cantons du nord (arrondissement de Nontron) apportent 7 mélodies, ceux de l'arrondissement de Périgueux 66 (dont près de la moitié de cris de métiers), contre 94 pour ceux de l'arrondissement de Bergerac et 206 pour ceux de l'arrondissement de Sarlat (à quoi on peut ajouter les 11 mélodies provenant du « Sarladais »). La répartition par cantons montre que la zone principale de collecte se situe au sud du département, dans une zone couvrant les cantons de Lalinde - 21 occurrences, Beaumont - 25, Monpazier - 15, Belves - 16, Sarlat - 13, Saint-Cyprien - 49, et, surtout, du Bugue : 111 occurrences, avec la commune de Manaurie, citée 101 fois, dont 91 fois seule. Ce qui montre l'importance du travail de terrain de l'abbé Casse, dont Manaurie était la paroisse.


Questions sur la crédibilité de la collecte
« Si l'on admet la sincérité des collecteurs », dit Coirault au détour d'un commentaire sur une variante textuelle. Il note par ailleurs que le premier recueil comprend « des arrangements lettrés ». Coirault parle ici des textes des chansons. Le corpus publié par Casse et Chaminade (tous volumes confondus, y compris les notations manuscrites de l'exemplaire de Périgueux) contient en effet, à côté de chansons traditionnelles, quelques pastiches lettrés. Mais sans doute le propos de Coirault vise-t-il au-delà. Peut-être s'applique-t-il au projet déclaré en lui-même : publier des chansons non pas traditionnelles - ou folkloriques, comme on disait alors - mais « en patois ». Le trait frappant de leur corpus est la quasi-absence de chansons en français. Or l'on sait, de manière générale, que souvent, au contraire, la part de ces textes dans un répertoire en pays « patoisant » est très importante, parfois supérieure aux textes en langue vernaculaire. Ainsi, pas très loin de chez Casse et Chaminade, en 1879, Jean-François Bladé consacrait tout un ouvrage aux Poésies populaires en langue française recueillies dans l'Armagnac et l'Agenais.
On peut légitimement se demander si certains textes des chansons qu'ils présentent n'ont pas été traduits en « patois ». Que le texte en patois de certaines chansons reprises d'un ouvrage à l'autre varie, par exemple en ce qui concerne la graphie de l'oc (voir notamment les chansons publiées d'abord dans la Revue de Philologie puis reprises dans le recueil de la Schola Cantorum ou dans le Mercure musical), cela peut être mis sur le compte d'une correction en fonction de l'évolution des exigences en la matière. Nous laissons aux occitanistes le soin de vérifier ce qui, dans ces évolutions des textes, tient à la recherche d'une meilleure graphie, et ce qui tient à d'éventuels « arrangements lettrés ». Mais ce qui est beaucoup plus surprenant, voire troublant, c'est la présence dans les adjonctions manuscrites de chansons en français qui avaient été précédemment publiées en patois (Ah viens donc ma Brunette / Ah vène doun bruneto, Germine se promène / Germino che permèno / Jermino che permèno, ou encore Catherine ell' est malade / Cotorino n'ey molàudo). Certes, leur nombre est peu important, mais le doute exprimé par Coirault peut s'en nourrir.
Il est difficile de déterminer si ce doute peut aussi s'appliquer aux mélodies. Nous disposons d'un certain nombre, relativement peu élevé, de mélodies reprises d'un ouvrage à l'autre. Sur les 28 mélodies publiées dans le recueil de la Schola ou dans le Mercure reprises de la Revue de Philologie, 14 le sont à l'identique, 4 le sont avec des différences (anodines ou plus substantielles), soit 78% pour 22%. Sur les 43 mélodies reprises de la Revue de Philologie dans les adjonctions manuscrites de l'exemplaire de Périgueux, la proportion est plus importante en faveur des reprises à l'identique : 84% contre 16%. Mais pour ce qui concerne les 30 mélodies publiées dans les Vieilles chansons et reprises dans les annotations manuscrites avec harmonisation, la proportion de mélodies modifiées s'élève à 33,3 %. Or, le nombre de mélodies harmonisées dans les Vieilles chansons s'élevait à près de 9 % des 219 mélodies recueillies par Casse et Chaminade : chiffre relativement peu élevé, mais non négligeable non plus. Cela dit, les différences sont le plus souvent de l'ordre de la durée de certaines notes, mais il y a tout de même quelques différences plus substantielles. On ne peut certes pas tirer de ces considérations un avis définitif sur la « sincérité » de Casse et Chaminade quant aux mélodies. S'ils ont mêlé à la publication de leur collecte des compositions, et des arrangements qui modifiaient les mélodies recueillies, on peut gager cependant que cela n'allait guère au-delà de la pratique habituelle des autres collecteurs de leur temps.

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