Ref. AEPEM 25/02
Traditionnel : Provence (16 titres), Pays niçois (5 titres)
Composition : Benjamin Melia (1 titre)
Textes : Luc Charles-Dominique et Sylvain Brétéché
Durée 44'34
Benjamin Melia est un joueur de galoubet tambourin aujourd’hui considéré comme l’un des meilleurs spécialistes de sa génération. Passionné depuis son enfance, Benjamin transmet également aujourd’hui cette musique à travers son enseignement à l’Institut d’Enseignement Supérieur de la Musique d’Aix-en-Provence, l’Institut International des Musiques du Monde et au Centre National de Création Musical de Pigna (dispositif Scolab). Directeur artistique du festival Provence/Saint-Pierre à Saint-Raphaël, sa ville natale, il y œuvre également à faire dialoguer création contemporaine et héritage culturel.
Benjamin nous détourne avec plaisir des sentiers habituellement battus par l’AEPEM, avec ce CD dédié au galoubet-tambourin (si ce n’était le nom de la collection, on pourrait écrire « aux galoubets »). À la fois plongé dans la connaissance du répertoire ancien lié à cet instrument et solidement ancré dans des pratiques plus contemporaines, il nous invite, avec des couleurs et des sons des plus variés, au cœur du répertoire ancien sacré et profane des pays de Provence et du Comté de Nice. L’élaboration de cet album a amené Benjamin à chercher un équilibre entre la « Fidélité à la Tradition » et une expression plus personnelle de sa sensibilité artistique. Qualité et soin de l’interprétation, vélocité, précision ou virtuosité de certaines mélodies à côté d’autres airs plus épurés et plus contemplatifs, tout cela offre à l’auditeur un paysage sonore remarquable. Avec cette production, Benjamin s’inscrit ainsi pleinement dans la continuité de l’album de Patrice Conte, dernier disque soliste de référence autour du galoubet tambourin, paru en 1999 aux éditions Cinq planètes. Le livret contient deux importants textes d’ethnomusicologie, l’un de Luc Charles-Dominique sur les représentations symboliques des flûtes dans l’histoire culturelle occidentale et française, l’autre de Sylvain Brétéché sur les questionnements d’ordre théorique que pose cet instrument-énigme.

Collection 1 :
Maîtresses et maîtres musiciens mettent leurs instruments au service d’un répertoire entièrement traditionnel lié à un pays précis. Ils nous proposent un cd en solo, sans invité ni doublage d’instrument.
Contact
contact.melia@gmail.com
Revue de presse et témoignages Cette publication est vraiment une belle initiative et que le résultat en fait l'un des albums les plus intéressants de cette collection.
Combien d'entre vous ont un album de galoubet-tambourin dans leur discothèque ? Combien d'entre vous sont capable de citer plus de trois instrumentistes jouant ou ayant joué de ce duo pour musicien seul ? Et je suis prêt à parier que des quatre albums de cette collection instrumentale AEPEM sortis l'été 2025, celui-ci n'a pas du être le plus vendu au Son Continu.... Y avait-il d'ailleurs des galoubets traditionnels sur les stands des luthiers à ce festival ? Il est légitime de se poser la question de la trop discrète présence de cet instrument, ou plutôt de ce couple d'instrument, dans le courant revivaliste, alors que d'autres flûtes à trois trous et leurs tambourins à cordes y ont bien mieux forgé leur place. Est-ce le statut d'instrument régional emblématique (1) qui a desservi le galoubet-tambourin ? Mais dans ce cas pourquoi le biniou kozh ou la cabrette n'en ont pas souffert de la même manière ? Et même au sein des musiques baroques, pourquoi musette et vielle sont-ils actuellement bien plus rejouées que ce couple qui eu droit pourtant lui aussi à sa place à Versailles.... N'oublions pas non plus que comme son cousin à cordes, le tambourin de Provence est, grâce à son timbre qui prolonge la résonnance et peut lui donner une quasi continuité, tout autant un véritable bourdon qu'une percussion rythmique. Il a donc toute sa place dans nos musiques à bourdons.
Tout ceci pour vous signifier que cette publication est vraiment une belle initiative et que le résultat en fait l'un des albums les plus intéressants de cette collection. Si Benjamin Mélia respecte la charte de celle-ci (jeu purement solo, répertoire quasi entièrement traditionnel du ou des régions citées), il se singularise par un jeu très novateur dont certaines particularités sautent rapidement à l'oreille et dont le livret détaille fort utilement l'usage en citant les plages concernées : polyphonie voix-galoubet, jeu à deux galoubets; son multiphonique, mesures asymétriques, utilisation du registre le plus bas, habituellement non utilisé etc... Il oublie juste de citer l'utilisation du tambourin qui, elle non plus, n'est pas toujours académique, voire absente ou remplacée par d'autres percussions. Et tout cela avec un jeu très ornementé au galoubet, parfois virtuose mais par ajout de notes, sans pour autant déroger au tempo et en conservant une cadence parfaite : un exemple en la matière. Bref, comme souvent dans cette collection, si le côté solo et instrument unique peut faire craindre une certaine monotonie (d'autant avec un instrument réputé strident), l'écoute de l'album convainc rapidement que cette crainte n'était pas fondée.
Les amateurs de noëls provencaux reconnaîtront au moins deux mélodies, dont celle qui ouvre l'album, ce qui leur permettra d'apprécier l'originalité de l'interprétation. Les autres mélodies me sont pour la plupart moins connues et c'est toujours bien agréable d'élargir ainsi son horizon.
Outre l'habituelle liste documentée (sources) des morceaux interprétés et de leurs sources, le livret comporte deux véritables articles, le premier de Luc Charles-Dominique sur la symbolique des flûtes dans l'histoire culturelle occidentale et française qui ne surprendra pas ceux qui sont familiers de ses écrits (je ne rappellerai pas ici mes désaccords sur certains points...), le second de Sylvain Brétéché, musicologue, qui à partir du cas particulier de cet instrument en Provence, rédige une véritable dissertation philosophique sur la tradition (un article à lire soit lentement soit trois fois...)
Voici donc une belle surprise que cet album. Espérons qu'il contribuera à faire davantage émerger ce couple instrumental hors du Sud-Est, et on ne saurait que remercier AEPEM d'avoir ainsi laissé plus de place que d'habitude à certaines expérimentations...
(1) et le cliché de la farandole....
Jean-Luc Matte http://musette.free.fr/infos.htm